Cendres

« La grande erreur de notre temps a été de pencher, je dis plus, de courber l’esprit des hommes vers la recherche du bien-être matériel… Il faut relever l’esprit de l’homme, le tourner vers Dieu, vers la conscience, vers le beau, vers le juste et le vrai, vers le désintéressé et le grand. C’est là et seulement là que vous trouverez la paix de l’homme avec lui-même et par conséquent la paix de l’homme avec la société. » V. HUGO (discours à l’Assemblée nationale 11.11.1848) nous rappelle le sens du carême, son bienfait pour chacun de nous : relever l’esprit de l’homme, le tourner vers Dieu. Le bien-être matériel n’est pas suffisant au bonheur de l’homme : l’homme ne se nourrit pas seulement de pain… Nous sommes invités à une prise de conscience ; chaque année nous avons cette opportunité, pour le bien de l’homme entier.

Le carême est un temps de conversion ou encore de pénitence ; il s’agit du même mot puisque pénitence signifie se repentir, se convertir. Il y a quelque chose à changer dans notre vie, dans toute vie d’homme. Le changement n’est pas forcément radical, il peut l’être parfois : comme quelqu’un qui déciderait d’en finir avec les excès de colère, d’alcool ou autre. Ou un autre qui prendrait la résolution de revenir au Seigneur de tout son cœur en allant se confesser. Plus souvent le changement se fait dans des petites choses, des ajustements nécessaires pour que les choses n’aillent pas de travers, comme deux droites pas tout à fait parallèles qui divergeraient et s’écarteraient de plus en plus l’une de l’autre. Si nous ne voulons pas nous éloigner de Dieu et du prochain nous devons rectifier, réajuster nos relations avec Dieu et avec le prochain.

  C’est le propre de la conversion de nous tourner vers Dieu, et la pénitence relève notre esprit, elle remet les choses à leur place. Car le problème n’est pas que nous ayons de quoi manger, que nous puissions vivre sans souci matériel, avoir de quoi nous loger, nous habiller, nous divertir, le problème est l’exclusion, la disproportion ou le déséquilibre, l’exclusion de Dieu et du prochain dans la vie quotidienne ou de leur laisser si peu de place qu’ils en deviennent presque absents si ce n’est quelques moments sporadiques. Le déséquilibre vient d’un envahissement du matériel, de la technique, du bien-être physique au détriment de la vie spirituelle, de la vie intérieure, au détriment de l’unité de toute notre personne.

Si nous ne donnons pas à Dieu sa place, Il n’aura plus d’effets dans notre vie. Nous pourrons nous dire chrétien, nous appeler chrétien, mais nous n’en aurons pas la vie, les attributs. Grâce à Dieu nous n’en sommes pas à ce point, nous qui, en cette année jubilaire, avons résolu d’entrer sans attendre dans ce temps béni du carême !

Chaque année le carême revient frapper à la porte de notre cœur, il s’invite chez nous, il nous invite à faire un nouveau pas. Peut-être ferons nous plus mais surtout nous tâcherons de faire mieux. Jésus nous donne trois moyens pour relever notre esprit, nous tourner vers Dieu. Ce sont trois moyens de pénitence.

Le jeûne. Avant d’être une privation le jeûne est une affirmation positive : je suis capable de Dieu, j’ai une âme faite pour Lui, il me manque. Les choses de la terre ne peuvent me combler, remplir ma vie, satisfaire mes désirs presque infinis.

La prière. Saint Thomas d’Aquin se pose la question de savoir si la prière est une pénitence ou non. Passer du temps agréable avec quelqu’un qui nous aime et qu’on aime ne peut être une pénitence. Cependant depuis que l’homme a tourné le dos à Dieu la prière est devenue difficile, il faut résister à la fuite en avant : « Je n’ai pas le temps », « il y a une urgence », « je ne ressens rien »…

L’aumône. Elle nous invite à l’ouverture aux autres. Elle développe ce qu’il y a de meilleur en nous, le don. Nous sommes faits pour nous donner et nous trouvons la joie dans le don.

              La pénitence sera plus facile si nous ne perdons pas de vue l’objectif : Pâques, la victoire de la Vie ! Il est important de donner du sens, de savoir où nous conduisent nos actions, nos décisions. Nous ne faisons pas le carême pour faire le carême, nous faisons le carême parce que nous voulons aimer davantage Dieu et le prochain, parce que nous voulons être trouvés plus fidèles, plus cohérents dans notre vie, parce que nous ne voulons pas qu’il y ait d’écart entre la Parole de Dieu et notre vie, entre ce que nous proclamons notre foi et notre vie.

Abbé Pierre PEYRET

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