Dieu sans idée du mal

Frères et soeurs bien-aimés voilà un évangile fait pour les chrétiens ! un évangile qui fait le chrétien ! Jésus le souligne dès le début : il s’adresse à ses disciples, à des disciples qui l’écoutent, non pas d’une oreille distraite mais pour faire ce qu’il dit. Il nous découvre toute la nouveauté de l’Evangile et ce qu’il y a de différents avec une pensée simplement humaniste, horizontale, sans perspective divine.

Jésus frappe fort d’entrée de jeu : Aimez vos ennemis,
faites du bien à ceux qui vous haïssent. Souhaitez du bien à ceux qui vous maudissent…
L’enjeu est celui du bien. Le triomphe du Mal, voilà ce qu’il faut éviter. Dieu est sans idée du mal ; Il ne le connaît qu’à travers nous, à travers nos refus, nos manques d’amour, qu’à travers ce que nous détruisons. Il ne veut pas que le mal se multiplie, qu’au mal on rajoute du mal.

Une bonne philosophie dit que le mal n’a pas d’existence en lui-même ; nous ne sommes pas manichéens : il n’y a pas un dieu du bien et un dieu du mal. Le mal est une amputation, une diminution du bien. Dieu est sans idée du mal parce qu’il est le bien en soi, bien infini. Comme le soleil qui ne sait que briller, Dieu ne sait qu’aimer, répandre le bien en dehors de Lui. Aimer, c’est vouloir le bien.

Aimer notre ennemi ne consiste pas à lui sauter dans les bras, rempli de bons sentiments, mais à lui vouloir du bien. Si quelqu’un commet le mal, notre premier souhait est de vouloir qu’il quitte ce mal car il en est aussi la victime : il détruit et il se détruit. Jésus nous invite à « noyer le mal sous l’abondance du bien » (St Josémaria). C’est le sens de la Croix : Jésus ayant aimé les siens, les aima jusqu’au bout. La Croix est l’affirmation de l’amour, Jésus donne sa vie pour les pécheurs, pour nous qui étions ses ennemis (ce n’est pas moi qui le dit mais Saint Paul : la preuve que Dieu nous aime, c’est que le Christ est mort pour nous, alors que nous étions encore pécheurs… nous avons été réconciliés avec Dieu par la mort de son Fils alors que nous étions ses ennemis). Jésus ne nous demande rien qu’Il n’ait fait Lui-même. C’est pourquoi nous Le regardons, nous cherchons dans sa manière de vivre la bonne façon de comprendre ses paroles.

Par exemple : À celui qui te frappe sur une joue, présente l’autre joue. Lorsque Jésus était conduit devant le grand-prêtre pour être jugé et condamné, le serviteur du grand-prêtre a giflé Jésus ; Jésus n’a pas tendu physiquement l’autre joue mais Il a dit : Si j’ai mal parlé dis-moi ce que j’ai dit de mal, sinon pourquoi me frappes-tu ? C’est ainsi qu’Il n’a pas rendu le mal pour le mal mais fait triompher la vérité. C’est cette grande maîtrise sur ses émotions, ses passions et ses pulsions, que Jésus possède, que le chrétien doit posséder aussi.

Nous devons apprendre à faire le bien et nous mettre du côté du bien tout entier. Le mal est corrosif, destructeur. Il est un piège sur notre route ; il veut nous détourner de l’Evangile, nous éloigner de Dieu. Aimer ses ennemis, tendre l’autre joue, bénir, c’est autant de manières de ne pas répondre au mal par le mal. Nous ne pouvons pas ajouter un autre mal au mal : seul le bien peut lui faire obstacle.

Nous ne pouvons pas nous accommoder du mal non plus. Dieu ne bénit pas le mal, Il bénit le pécheur pour qu’Il se détourne de son mal. Laxisme, utopie, résignation, désertion ne sont pas des valeurs évangéliques. Il faut au minimum que le Mal ne passe pas par nous. « Tout le monde le fait » n’est pas un argument en faveur du bien. Le but est que le mal cesse, non qu’il perdure, encore moins qu’il se multiplie, ni en moi ni en l’autre.

C’est peut-être ainsi qu’il faut entendre la Parole : Donne à quiconque te demande, et à qui prend ton bien, ne le réclame pas. Si mon bien est source d’un plus grand bien, tant mieux. Jésus ne fait pas l’éloge du vol ! Jésus s’est souvent senti bien seul, seul face aux hommes mais pas face à la vérité du bien. Face aux pharisiens Il défend les droits de Dieu, Il réprouve l’adultère et affirme l’unité du mariage ; face à Pilate Il rappelle que tout pouvoir est un service rendu à la vérité.

Ce n’est pas très confortable de se retrouver seul pour défendre le bien mais c’est seulement ainsi que la lumière ne s’éteint pas complétement et qu’elle peut encore éclairer les nuits d’égarement.

Saint Jean de la Croix dit « Là où il n’y a pas d’amour, mettez de l’amour et vous recueillerez de l’amour. » c’est ce rôle que le disciple de Jésus qui écoute est appelé à tenir aujourd’hui. Dieu ne bénit pas le mal, Il nous bénit pour que nous multiplions le bien. Nous recevons cette bénédiction à la fin de chaque Messe et Il nous envoie porter le bien qu’Il est en plénitude.  

Abbé Pierre PEYRET

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